Chaque année, des milliers de personnes quittent leur pays d’origine pour commencer une nouvelle vie au Canada, que ce soit pour des motifs sociaux, économiques, humanitaires, ou encore pour se rapprocher des membres de leur famille. Parmi eux, plusieurs sont des aînés. Une étude récente de Statistique Canada révélait que :
- Chez les hommes, les immigrants européens et non européens étaient plus susceptibles de connaître la solitude que la population née au Canada.
- Chez les femmes, la probabilité de connaître la solitude était plus élevée parmi les immigrantes européennes que parmi les femmes nées au Canada.
- Tant chez les hommes que chez les femmes, les immigrants arrivés à l’âge adulte (de 18 à 44 ans) et les immigrants de longue date (20 ans ou plus au Canada depuis l’immigration) présentaient un risque de solitude plus élevé que la population née au Canada.
- Les personnes qui étaient atteintes de plusieurs maladies chroniques (ce qui est très commun chez les aînés) ou qui faisaient face à des obstacles à la participation sociale étaient plus susceptibles de se sentir seules.(1)
Ces aînés courent ainsi davantage de risque de souffrir d’isolement social et de solitude, car ils font face à divers défis particuliers : différences linguistiques, barrières culturelles, racisme et discrimination, réseaux sociaux limités, et obstacles à la participation sociale. Ils sont plus susceptibles de vivre dans la pauvreté, d’être en moins bonne santé et d’avoir de la difficulté à accéder aux ressources.
Comment lutter contre l’isolement social et la solitude chez les aînés immigrants et réfugiés?
Ce que la recherche nous apprend
Une synthèse de 17 études s’est intéressée à l’isolement social et à la solitude chez des immigrants et des réfugiés canadiens âgés de 55 à 93 ans.(2) Peu d’études existent sur cette réalité et la majorité d’entre elles ont été menées en Ontario, dans des grandes villes, auprès de personnes âgées immigrées et réfugiées chinoises, sud-asiatiques, iraniennes, allemandes, afro-caribéennes, ex-yougoslaves et espagnoles.
Cette synthèse a permis de dégager cinq thèmes :
1. Le sentiment de perte
Perte d’autonomie, perte du réseau social, décès du partenaire de vie, perte des repères linguistiques et culturels… Les aînés peuvent se sentir étrangers à la culture canadienne et avoir du mal à s’intégrer pleinement. Les différences de traditions, de coutumes et de valeurs peuvent engendrer un sentiment de perte d’identité. L’incapacité à communiquer efficacement dans les langues officielles du pays peut entraîner un sentiment d’isolement, et l’apprentissage d’une nouvelle langue à un âge avancé peut être une tâche difficile et frustrante.
2. Les conditions de vie
En général, les personnes âgées qui se sentent appréciées et qui sont prises en charge par leur famille ressentent moins de solitude que celles qui vivent seules. Attention, toutefois : certaines études démontrent qu’habiter chez ses enfants adultes peut accroître l’isolement social en réduisant les possibilités d’interaction avec les autres.
3. La dépendance
S’adapter à une nouvelle culture et s’établir dans un nouveau pays est difficile pour les aînés. Les aînés qui étaient autonomes dans leur pays d’origine peuvent se retrouver dépendants de leur famille au Canada pour communiquer, participer à la vie communautaire, s’inscrire aux activités physiques et sociales, ou se déplacer. La dépendance financière et l’impression d’être un fardeau pour la famille augmentent aussi les risques de maltraitance et d’abus selon certaines études.
4. Les défis et les obstacles
Une étude a montré que l’isolement social et la solitude étaient généralement liés au manque de connaissances sur les ressources disponibles et sur comment y accéder (notamment l’accès aux soins médicaux), aux barrières linguistiques et culturelles, ainsi qu’au « mal du pays » (c’est-à-dire ce malaise ressenti par certaines personnes, ou leurs descendants, ayant quitté leur pays d'origine).
Les aidants familiaux des aînés immigrants et réfugiés vivent aussi de l’isolement et de la solitude, car ils ont souvent des moyens financiers limités, une connaissance insuffisante des soutiens et services disponibles, des heures de soins à domicile inadéquates et un accès difficile aux soins de santé dû, entre autres, aux barrières linguistiques et culturelles.
5. Les conflits familiaux
Les sources de conflits potentiels sont nombreuses : tensions intergénérationnelles, normes et attentes différentes, mépris et perte des valeurs familiales, défis économiques, obligations traditionnelles non respectées, changements dans les rôles traditionnels des hommes et des femmes, maltraitance, négligence et violence, sentiment d’être un fardeau. De tels conflits familiaux peuvent contribuer à l’isolement et à la solitude des aînés.
Soutenir l'engagement social des aînés
Plusieurs initiatives visent à soutenir la socialisation et la participation communautaire des aînés immigrants et réfugiés (ainsi que et leurs aidants) :
- Cours de langue (français et/ou anglais) et activités d’intégration
- Bénévolat
- Activités physiques, artistiques et culturelles variées et inclusives (chorale, cuisine collective, tricot, etc.)
- Événements religieux (messes, rencontres à l’église)
- Programmes intergénérationnels
- Soutien aux aidants naturels et aide à domicile
- Services de transport adaptés