Vos parents ou grands-parents sont âgés. Ils ont besoin de soins quotidiens. Vous craignez qu’ils fassent une mauvaise chute...
Vous croyez peut-être que la meilleure solution pour eux serait de quitter leur maison pour emménager dans un petit logement avec assistance ou dans un centre d’hébergement et de soins de longue durée. La décision semble logique et simple à prendre, mais avez-vous songé aux impacts sociaux et psychologiques qu’un tel changement occasionne chez nos aînés? La décision de quitter leur domicile est parfois douloureuse. Ils doivent quitter un environnement auquel ils sont attachés et où ils se sentent bien. Ils doivent quitter leur voisinage et leurs amis. Ils craignent peut-être de sacrifier leur autonomie et leur vie privée.
Au Canada, environ 90% des personnes âgées de 65 ans et plus vivent encore dans leur maison.(1) On estime que 30% des personnes âgées de 75 ans et plus et 50% de celles âgées de 85 ans et plus reçoivent des soins à domicile.(2) Lorsque l’aide devient insuffisante et que l’autonomie et les capacités diminuent (tant sur le plan physique que cognitif), les aînés et leurs proches doivent évaluer leurs options. Il peut s’agir de rester dans leur domicile et l’adapter, ou encore déménager dans un logement adapté avec ou sans soins additionnels. De telles réflexions sont souvent difficiles puisqu’elles sont empreintes d’émotions. Il est donc important de bien saisir ce que représente la maison pour un aîné, ainsi que l’éventail de facteurs qui peuvent influencer leurs décisions.
Ce que la recherche nous apprend
Une revue systématique s’est penchée sur les facteurs influençant la prise de décision des aînés en perte d’autonomie âgés de plus de 65 ans (et sans déficience cognitive) au sujet du domicile.(3) Les études recensées par cette revue systématique ont permis d’identifier 88 facteurs regroupés en six dimensions :
1) la dimension psychologique et psychosociale (par exemple, le niveau de contrôle, la sécurité et le confort physique et psychologique);
2) la dimension socioéconomique et santé (par exemple, les facteurs liés à l’âge et à l’état de santé, le revenu, et le niveau d’éducation);
3) la dimension économique (par exemple, les facteurs liés à la propriété, à l’investissement financier, à l’épargne, au logement abordable);
4) la dimension sociale (par exemple, les lieux de socialisation, les concepts d’intimité et de refuge);
5) la dimension temporelle et spatio-temporelle (par exemple, vivre dans un milieu que nous connaissons, auquel nous sommes attachés, et qui nous offrent des souvenirs); et
6) la dimension de l’environnement bâti ou naturel (par exemple, les facteurs liés aux milieux urbains ou naturels, l’accès à des services et installations commerciales, la sécurité du milieu de vie et l’accessibilité des logements).
Les résultats révèlent que les facteurs qui avaient le plus de poids en matière de domicile touchaient principalement aux dimensions sociales, psychologiques et psychosociales. Parmi les facteurs ayant le plus de poids dans le processus décisionnel, il y a notamment le sentiment de contrôle sur la décision et l’environnement, les relations avec le voisinage, les routines et les habitudes de vie, l’accès aux commodités, l’accès aux professionnels de la santé, le sentiment de confort et d’indépendance, les activités sociales et les réseaux sociaux, la proximité des services et de la famille, la possibilité d’adapter les domiciles, ainsi que des événements déclencheurs (c'est-à-dire des événements qui entraînent un déclin de la santé physique, cognitive ou mentale chez les personnes âgées). À l’inverse, la dimension socioéconomique semblait avoir moins de poids dans le processus décisionnel.
Rester ou quitter, voilà une décision bien délicate et complexe. Cela dit, avoir une meilleure compréhension de l’éventail de facteurs influençant les aînés aidera les proches et les professionnels à mieux soutenir les aînés dans le processus de réflexion. Ultimement, cela aidera les aînés à prendre la meilleure décision possible en matière de logement, et ce, en fonction de leur propre situation et de leurs valeurs.
Les recherches démontrent qu’on ne peut prendre des décisions en matière de soins seulement en fonction des soins requis, et ce, sans égard aux facteurs sociaux, psychologiques et psychosociaux qui ont une si grande importance pour les aînés. Nous avons ainsi tout à gagner à adopter une approche centrée sur les besoins globaux des aînés. Les recherches suggèrent également le besoin d’explorer des solutions de logement pour combler les besoins sociaux, de confort et d’indépendance des aînés. Ceci pourrait prendre la forme de domiciles adaptés pour éviter de déraciner les aînés qui souhaitent rester dans leur domicile, ou encore de concevoir des logements alternatifs dans lesquels les aînés se sentent comme à la maison.