Ne traversez pas l’épreuve en solitaire : le deuil en temps de pandémie

Les messages clés

  • La pandémie de COVID-19 a perturbé grandement l’expérience individuelle et sociétale de la mort et du deuil en raison des mesures de santé publique visant à contrer la propagation du virus.

  • L’impossibilité d’accompagner certains proches en fin de vie, et le besoin de modifier certains rites (voire même l’impossibilité de les pratiquer) ont affecté le processus de deuil.

  • Afin de permettre aux gens de vivre leur deuil lors d’une pandémie, il faudra trouver des façons alternatives ou virtuelles d’honorer les morts et d’apporter du réconfort aux proches.

Les expériences de fin de vie et de deuil ont été grandement bouleversées depuis le début de la pandémie de COVID-19.(1; 2) Diverses mesures de santé publique ont dû être prises afin de contrer la propagation du virus. Il suffit de penser aux mesures de distanciation physique, aux mesures d’isolement et de confinement dans certains établissements (dont les hôpitaux et les centres d’hébergement et de soins de longue durée), aux mesures de prise en charge des dépouilles et des services funéraires, ou encore aux mesures liées à l’interdiction de rassemblements.(3) Bien que ces mesures soient importantes pour ralentir la propagation du COVID-19, elles ont fait en sorte que de nombreuses familles ont perdu des proches sans avoir pu les accompagner dans leurs derniers moments, ou encore d’honorer leur mémoire lors d’événements publics. Nul doute que cela peut contribuer à la peine et à la détresse des personnes endeuillées.

Que pouvons-nous apprendre des pandémies antérieures et des éclosions de maladies infectieuses concernant les soins ou les soutiens requis pour permettre aux gens de vivre leur deuil lorsque de mesures de santé publique strictes sont en place ?

Ce que la recherche nous apprend

Une récente revue systématique de six études s’est intéressée à l’impact que des éclosions de maladies infectieuses sur le deuil, et ce, en Afrique de l’Ouest (Ebola), en Haïti (choléra) et à Singapour (SRAS).(4)

Cette revue révèle que peu d’études ont été réalisées à ce sujet. De plus, ces études provenaient en majorité de pays à faible ou moyen revenu (à l’exception de Singapour) et de pays dotés de systèmes de croyances culturelles et spirituelles différents de ceux ayant cours dans les sociétés occidentales. On constate toutefois que plusieurs éléments peuvent très bien s’appliquer à la pandémie actuelle de COVID-19.

Aussi, bien que les études ne portaient pas spécifiquement sur les personnes endeuillées et se concentraient sur celles qui ont eu la maladie et qui se sont rétablies, il est reconnu que les survivants des pandémies de choléra, d’Ebola ou de SRAS ont été confrontés au décès de plusieurs de leurs proches. Les études ont ainsi permis d’identifier trois thèmes communs liés à la mort et au deuil en temps de pandémie.

1. Une perte vécue à différents niveaux: outre la perte de membres de la famille et le fait d’assister à la mort d’autres personnes, les gens vivent aussi une perte symbolique du mode de vie, de la culture et des pratiques sociales en temps de pandémie. Le mode de transmission des maladies infectieuses et les mesures de confinement et de distanciation vont à contre-courant du désir d’offrir des soins compatissants aux malades et à leur famille en fin de vie.

2. Une grande incertitude: l’évolution rapide et incertaine de certaines maladies ne permet pas de préparer adéquatement les familles face à la mort imminente de leur proche. En outre, les informations fournies par les autorités compétentes et l’interprétation qui en sont faites par les individus en fonction de leurs perceptions et de leurs croyances peuvent contribuer à maintenir cette incertitude et à retarder la préparation psychologique au décès. Cette incertitude peut engendrer de la peur à la fois chez les patients, les aidants et les professionnels, et mener à une augmentation de la détresse psychologique et parfois même à des réactions de colère à l’égard des individus et des institutions.

3. Une capacité limitée de soutien social: la capacité des individus à se soutenir pendant la maladie ou le deuil est limitée lors de pandémies, que ce soit entre les patients, les familles, les aidants ou les professionnels. Par exemple, l’obligation de porter des équipements de protection et l’isolement des patients infectés limitent les contacts physiques et restreint les visites des membres de la famille. De plus, la mise en place de mesures de distanciation physiques et l’interdiction de rassemblements publics empêchent les membres de la famille de se réunir pour vivre collectivement leur deuil.

 

Vivre le deuil autrement en temps de pandémie

Si vous avez perdu un être cher pendant la pandémie, quelques gestes simples pourraient vous aider à entreprendre votre deuil :

Restez connectés. Invitez les gens à vous appeler ou organisez des conférences téléphoniques ou virtuelles avec des membres de votre famille et des amis pour rester en contact. Partagez des histoires et des photos par courrier postal, courriel, téléphone ou chat vidéo ou via des applications ou des médias sociaux.(5)

Réinventez les rituels et les pratiques du deuil de manière respectueuse, en accord avec la foi ou la culture des familles, pour souligner le départ de l’être cher. Pourquoi ne pas créer un livre de mémoire virtuel, un blogue ou une page Web pour que vos proches puissent honorer la mémoire de votre être cher, partager des souvenirs et vous soutenir. Préparer le repas préféré de votre être cher ou tout autre geste concret qui a de l'importance pour vous et votre proche décédé.(5)

Demandez de l’aide. Il est essentiel d’obtenir de l’aide si vous ou l’un de vos proches traversez une crise ou avez besoin de soutien émotionnel.(5) Services de crises du Canada fournit une liste de centres d'aide et d'écoute partout au pays (dont des groupes locaux de soutien au deuil). Ces centres sont là pour répondre aux personnes qui demandent de l'aide.

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Références

  1. American Psychological Association. Grief and COVID-19: Mourning our bygone lives, 1 avril 2020.

  2. Canadian Mental Health Association. Loss and grief during the COVID-19 pandemic. 2020.

  3. Government of Canada. Interim guidance: Death care services and handling of dead bodies during the coronavirus disease (COVID-19) pandemic. 7 juillet 2020.

  4. Mayland CR, Harding AJE, Preston N, Payne S. Supporting adults bereaved through COVID-19: A rapid review of the impact of previous pandemics on grief and bereavement. Journal of Pain and Symptom Management. 2020;S0885-3924(20):30388.

  5. U.S. Centers for Disease Control and Prevention. If you have lost a loved one during the COVID-19 pandemic. 11 juin 2020.

 

AVIS DE NON-RESPONSABILITÉ: Ces résumés sont fournis à titre informatif seulement. Ils ne peuvent pas remplacer les conseils de votre propre professionnel de la santé. Les résumés peuvent être reproduits à des fins éducatives sans but lucratif. Toute autre utilisation doit être approuvée par le Portail du vieillissement optimal de McMaster (info@mcmasteroptimalaging.org).

Plusieurs de nos billets de blogue ont été rédigés avant la pandémie de COVID-19 et ne reflètent donc pas nécessairement les dernières recommandations de santé publique. Bien que le contenu de ces billets de blogue (qu’ils soient nouveaux ou plus anciens) identifie des activités qui favorisent un vieillissement optimal, il est important de s'en tenir aux recommandations de santé publique les plus récentes en matière de prévention et de risques. Il se peut que certaines des activités suggérées dans ces billets de blogue doivent être modifiées ou évitées complètement afin de se conformer aux nouvelles recommandations en matière de santé publique. Pour consulter les dernières mises à jour de l'Agence de la santé publique du Canada, veuillez visiter son site Web.